Vivons heureux en attendant la gauche !

Doit-on voir, dans cette affiche, autre chose qu'une publicité idiote ? Probablement lorsqu'on sait ce qui s'est passé en 1995, et qu'on se rappelle que cette campagne se réfère au slogan de la droite de l'époque. Est-ce à dire que Nicolas Sarkozy va nous en faire bouffer, de la macédoine au maïs ? Y a-t-il une quelconque métaphore à analyser ? La macédoine est-elle une représentation fantasmée de la société qui nous attend (une société émiettée, toute molle, prémâchée) ? En tout cas, une chose est sûre, entre conserve et conservatisme, il n'y a qu'un pas, que la France a, une nouvelle fois, franchi depuis dimanche.

Doit-on entrer dans la désespérance pour autant ? Pas sûr...  Lorsqu'on regarde le monde qui nous entoure, on s'aperçoit vite que l'accession de la gauche au pouvoir est, bien souvent, une exception, un accident. En Espagne, par exemple, la (très) mauvaise gestion des attentats de Madrid a été une des raisons qui a grillé le gouvernement de droite. En 1981, en France, l'arrivée de Mitterand peut s'expliquer par la certitude des conservateurs de l'époque que jamais la gauche n'accéderait au pouvoir. Le monde est clairement conservateur. L'Ordre et la Sécurité, ou une certaine vision de ceux-ci, ont, de tout temps, enthousiasmé les électeurs.

Être de gauche, c'est donc, avant tout, accepter d'entrer en résistance contre l'Ordre établi. Être de gauche, c'est aussi savoir que rien n'est éternel, et que tout peut être, malheureusement, remis en question (le droit des femmes, le droit des homos, la peine de mort, l'avortement, le PACS, le droit du travail, le droit de grève...). Être de gauche, c'est enfin ne pas se laisser bercer par une vision manichéenne des choses. Non, la droite n'est pas une instance diabolique; non, les gens de droite ne sont pas dans l'erreur totale ; non, les conservateurs ne sont pas de futurs progressistes qui n'ont pas encore été baignés par la Lumière céleste de la gauche. La droite est une certaine vision des choses, la gauche en est une autre. Nul ne détient la Vérité absolue, et les deux visions contiennent une grande sincérité. La France a un président de droite depuis 12 ans. L'accession de Sark Vador au pouvoir ne va faire qu'entériner ce qui se fait déjà, et depuis un moment.

Être de gauche, c'est donc, peut-être, accepter de quitter une certaine naïveté, accepter de se déniaiser. Le monde est conservateur, mais le combat et la résistance sont des notions essentielles. Rien n'a été acquis facilement. Nous ne verrons probablement jamais, de notre vivant, le résultat de certains de nos combats, mais l'essentiel n'est pas là.

Restons vigilants, Restons mobilisés.