Petit grain de sable dans l'océan
Un matin, à Cannes. Il faisait encore frais, il était sept heures.
Il ne sculptait pas le sable. Il le creusait plutôt.
Il ne faisait que révéler ce qu'il pouvait contenir.
Se trouvent en présence le nageur et la femelle de requin, sauvée par lui. Ils se regardèrent entre les yeux pendant quelques minutes ; et chacun s'étonna de trouver tant de férocité dans les regards de l'autre. Ils tournent en rond en nageant, ne se perdent pas de vue, et se disent à part soi : "je me suis trompé jusqu'ici ; en voilà un qui est plus méchant." (...) Arrivés à trois mètres de distance, sans faire aucun effort, ils tombèrent brusquement dans les bras l'un de l'autre, comme deux aimants, et s'embrassèrent avec dignité et reconnaissance, dans une étreinte aussi tendre que celle d'un frère ou d'une soeur. (...)
Les chants de Maldoror, chant deuxième, Isidore Ducasse