De l'art de jouer avec les chiffres (encore et toujours)

Mathématiques sévères et respectables... Il est toujours troublant, particulièrement lorsqu'on est en pleine campagne d'aspirants princes, de constater le pouvoir incroyable du chiffre. Autant un argument, autant une hypothèse se contre, autant un chiffre impressionne. Il suffit qu'un Prince, ou qu'un Aspirant, en cite un pour qu'on s'incline.

Déjà, cette magie incroyable s'opère dès l'école. Aucune matière n'est aussi élitiste que les mathématiques. Aucune matière n'exclue autant d'individus. Le prof de maths exerce toujours un pouvoir incroyable. Il est capable de jongler avec l'abstraction, de décoder des cryptogrammes, lorsque le prof de français est tout juste capable de sortir un vague texte de Hugo en vue d'une dictée.

Chaque année, le clan des exclus des maths grossit un peu plus. C'est d'autant plus surprenant que, naturellement, les enfants sont attirés par les mathématiques et par la lecture. Mais, autant celle-ci nous est présentée comme une ouverture sur l'imagination, autant celle-là devient, très vite, une vieille chose sèche et ingrate.

Princes et Aspirants ont bien compris cela, et savent bien que, face à un chiffre, nous nous inclinons. Parce que citer un chiffre fait sérieux. Illusion de prestidigitateur de seconde zone.

Une photo, sortie de son contexte, sans légende, peut être interprétée de multiples façons. Il en est de même pour le chiffre. On peut lui faire dire ce qu'on veut...

Et me voilà en train de rêver... Imaginons une émission politique où une armée de spécialistes (avec des supers ordinateurs, et des téléphones portables à oreillettes... Du sérieux, du lourd !) vérifierait, en direct, chacun des chiffres que citeraient Princes et Aspirants. Imaginons, dans cette même émission, des journalistes qui demanderaient systématiquement l'origine des chiffres cités...

Alors, on verrait des Princes et des Aspirants, qui feraient moins les malins, et qui useraient avec parcimonie de ces arguments d'autorité mathématiques...