De l'art de créer du malheur
Ce qu'il y a de pénible avec le bonheur, c'est qu'il ne pas s'empêcher de vous péter à la gueule au moment où, justement, vous auriez besoin qu'on vous laisse en paix.
Après la rude épreuve de Noël guimauve et du jour de l'an gueulard, voici donc la Saint Valentin pour hurler avec les loups.
Une fois de plus, une fête tente de normaliser les rapports humains. Il faut être amoureux ce jour-là, pour faire partie de la grande masse festive. Si ce n'est pas le cas, il faudra se précipiter dans les soirées spéciales célibataires pour dénicher l'âme frère ou soeur... Mais attention, ça ne suffira pas. Il faudra aussi offrir à son valentin ou à sa valentine un objet kitch couvert de gros coeurs rouge bonbon, à moins que vous préfèreriez opter pour une annonce dans les quotidiens à 15 euros pièce.
Immense business, la Saint Valentin est avant tout une magnifique machine de consommation. Mais, au delà de ça, elle renvoit les célibataires dans une sorte de honte. Car il ne fait pas bon être célibataire, et il n'a jamais fait bon de l'être. Être célibataire trop longtemps, ça cache quelque chose, un problème, un truc sale et pas avouable.
Aujourd'hui, sous couvert de grande liberté, la société ne s'est jamais autant référée aux anciennes valeurs, parce qu'elle n'en n'a finalement guère de nouvelles à proposer. La norme est plus que jamais hétérosexuelle. Mais ça ne suffit pas. Il faut aussi que ces hétérosexuels procréent, sinon, ça ne va pas.
On a beau ne pas le dire explicitement, une femme se doit d'être mère pour être pleinement épanouie. D'ailleurs, ne perpétue donc pas la fameuse Sainte Catherine, où on exhibe les femmes célibataires de plus de 25 ans ?
Adolescent, cette fête m'a, chaque année, renvoyé dans mes propres angoisses (pourtant j'avais largement mon compte d'interrogations à l'époque, mais bon...) jusqu'à ce que je comprenne que mon chemin ne regardait que moi, que ce que je faisais, je pouvais le faire à mon rythme.
Il serait bien, aussi, que les médias ne soient pas le relais débilitant de cette fête antédiluvienne. Si elle en excite quelques uns, tant mieux, mais qu'on respecte aussi ceux qui ne sont pas amoureux pour telle ou telle raison à ce moment-là.
J'entends déjà certains d'entre vous qui susurrent intérieurement que je ne suis jamais content, et que j'aurai de toute façon toujours quelque chose à redire sur les fêtes. C'est faux ! J'aime juste les fêtes qu'on ne m'impose pas trop. Ou alors les fêtes où je suis du bon côté sans faire d'efforts particuliers...
J'adore la fête des morts, le 1er Novembre, par exemple !